Hier le triptyque “qualité-coût-délais”, aujourd’hui celui de “carbone, circularité, coopération”. En 2025, les achats n’ont plus le choix : face aux crises, aux nouvelles régulations et aux attentes de la société, ils doivent se réinventer. Leur objectif ? Acheter moins mais mieux.
Point de bascule pour les achats
Les achats représentent, en moyenne, 60% du chiffre d’affaires d’une entreprise. Ce chiffre peut même atteindre 80% du chiffre d’affaires dans certains secteurs d’activité (source Harvard Business Review - 01/04/2021). Et pourtant les départements achat, clefs de la rentabilité de l’entreprise, sont (trop) souvent sous la ligne de flottaison. Cette discrétion, toute confortable, est néanmoins en train d’éclater au grand jour. En 2025, nous sommes arrivés à un point d’inflexion.
La structure même des achats se trouve bousculée par plusieurs facteurs exogènes et l’oblige à se repenser tant sur la manière d’acheter que sur la posture et la vision à tenir. Parmi ces facteurs, citons-en quatre en particulier :
- Une chaîne de valeur sous les critiques de la société civile. L’effondrement tristement célèbre du Rana Plaza (2013) a violemment levé le rideau sur les pratiques des entreprises textiles. Jusqu’alors invisible, le monde entier a découvert une réalité que personne ne voulait voir. Depuis, la société civile met la pression sur les entreprises et les pousse à s’aligner, à faire preuve d’une rigueur exemplaire. La réglementation lui a emboîté le pas, particulièrement en France et en Europe.
- Une réglementation qui oblige les entreprises à l’intégration de pratiques durables (environnementales, sociales, sociétales) et une transparence sur toute leur chaîne de valeur. Et ces outils se révèlent payants pour influencer les actions et les politiques existantes mais également pour amorcer un changement concret sur le moyen et le long terme. Vous aurez reconnu la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), la CS3D (directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité), etc.
Malgré l’ère du temps qui voudrait réduire la voilure sur les réglementations environnementales et sociales ("omnibus"), les entreprises, elles, contrairement à ce qu’on leur fait dire, sont pour une réglementation plus exigeante et une comparabilité entre elles sur les sujets de durabilité. C’est ce qu’a dévoilé en mai 2025, le collectif #WeAreEurope dans une enquête européenne inédite. Les 1062 entreprises répondantes révèlent que la majorité d’entre elles soutiennent largement (à 61% en Europe et 64% en France) les exigences actuelles de reporting extra-financier. Seules 17% en sont insatisfaites !
- Un réchauffement climatique qui enraye la mécanique bien huilée des achats avec des ruptures d’approvisionnement de plus en plus fréquentes. Les dérèglements de notre climat, qui ne font que commencer, amènent avec eux leur lot de catastrophes naturelles, de plus en plus fréquentes et intenses. Et forcément les impacts sur les sociétés humaines et leurs activités sont immédiats.
- Une réelle difficulté à appréhender la chaîne de valeur… tant elle peut être complexe, et c’est peu de le dire. EcoVadis, remonte dans son baromètre 2024 que seulement environ la moitié des entreprises ont une visibilité sur plus de 50% de leurs fournisseurs de rang 1. Autrement dit, 1 entreprise sur 2 ne connaît pas la moitié de ses fournisseurs directs… Et lorsque l’on descend au rang 2, ce chiffre tombe à 20% ! Le chiffre est autant compréhensible qu’affolant.
Une transformation en marche mais difficile à mettre en œuvre
Face à ces différents constats et compte tenu de l’importance de l’impact environnemental et social de la chaîne de valeur amont (qui représente jusqu’à 70% de ce même impact environnemental selon une étude EY de 2023), le triptyque classique “qualité-coût-délais” est voué à changer, pour de bon.

L’enjeu majeur consiste dorénavant à intégrer la durabilité tout au long de la relation fournisseur (de la sélection des partenaires, au suivi de la performance en passant par les négociations et la contractualisation), pour anticiper les crises, préserver l’entreprise de « bad buzz » et surtout aligner les pratiques achats sur la stratégie RSE.
Côté pile, les achats deviennent l’indispensable "bras armé" des ambitions durables de leur entreprise, côté face ils doivent en un temps record pivoter et se repenser en profondeur en intégrant des challenges stratégiques, RH, organisationnels et bien sûr financiers… Car l’enjeu de la transition implique des investissements forts tout en améliorant les marges… Bref, la mue vers les achats responsables n’est pas une mince affaire.
Si certaines entreprises ont montré la voie (à l’instar de Schneider et de la Poste, pour ne citer qu’eux), force est de constater que le tempo de transformation n’est pas encore là. Si 93% des organisations françaises ont, selon le baromètre 2024 de l’Obsar, engagé une démarche Achats Responsables, il ne faut pas oublier que près d’un tiers l’ont fait très récemment, lors des deux dernières années. Et ce en majorité dans le secteur public et celui des PME. Toujours, selon la même étude, un tiers des organisations de plus de 1 000 salariés n’ont pas encore de cartographies des risques. Le chiffre parle là encore, de lui-même.
La dernière étude d’Ecovadis intitulée “Les entreprises passent à l’action”, pousse un peu plus loin le constat, au niveau international notamment : "60% de l’ensemble des entreprises évaluées, et 75% des entreprises évaluées pour la première fois, se trouvent toujours dans la zone de risque élevé" (inférieur à 45 sur l'échelle EcoVadis).
Acheter mieux : les ingrédients de la réussite
Alors comment faire pour que les achats responsables deviennent la norme ?
La baguette magique n’existe malheureusement pas, mais à bien y regarder, une voie émerge. Laquelle ? Celle d’accepter de reconsidérer l’habituel et de sortir des dogmes. On vous l’illustre à travers quatre axes :
Premier axe, penser carbone
Les entreprises estiment que la principale barrière à la décarbonation est le manque d’investissement pour 61% d’entre elles (Argos - BCG_Climate Transition Barometer 2025 - Forget the noise : Climate Action accelerates in European businesses). Qu’à cela ne tienne : arrêtons de croire qu’économie et écologie ne vont pas ensemble.
Pour preuve, 88% des entreprises françaises étudiées dans le baromètre Obsar de 2024 déclarent que le poste de coûts pris en compte le plus fréquemment pour les achats équipements est… le coût d’acquisition. Or, on sait qu’il ne représente qu’environ un tiers du coût global (cf. étude R3). En effet, 75% se retrouve dans l’usage des équipements et intègre la maintenance, l’énergie, mais aussi le CO2, l’eau, etc. Le coût facial n'est donc pas la bonne boussole. Le TCO qui intègre les matérialités environnementales, oui. C’est ce que nous appelons chez R3 le TCO2. Cette nouvelle évaluation des achats est LE compas à privilégier. Il permet d’identifier des gains environnementaux et financiers. Plus encore, il ouvre de nouvelles perspectives pour piloter l’usage des équipements et de financer autrement les acquisitions.
L’angle mort de l’usage tient aussi une à une dispersion des datas dans des divisions différentes (achats, équipements, terrain...)… Ceci explique certainement cela pour partie, mais pas complètement. Mais cela amène un autre point.
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Deuxième axe, travailler ensemble
Que ce soit avec ses clients internes et/ou avec ses fournisseurs stratégiques, le futur est dans la collaboration. Développer des relations dites “gagnant-gagnant” permet de créer des synergies uniques, de fidéliser les fournisseurs et de bénéficier avant d’autres des innovations responsables. C’est ce qu’on appelle l’avantage concurrentiel, au service d’une transition qui a du sens.
Troisième axe, transformer la culture achats
Une personne au Comex d’une grande entreprise confiait il y a peu aux équipes R3, qu’elle ne pensait pas "qu’il fallait autant de temps pour changer une culture achat. Qu’il fallait, en fait, investir dans cette mue". Embarquer ses équipes, quelle que soit la taille de l’entreprise devient un enjeu majeur, si ce n’est le plus crucial. Former, accompagner, récompenser les succès (durables)... La transformation embarque et donne un sens commun, à hauteur "d’homme et de femme", qui rejaillira sur les relations en interne, avec les fournisseurs mais également en recrutement.
Quatrième axe, Transformer la culture achats (bis)
Il y a peut-être également tout à gagner à repenser la manière dont les négociations se font classiquement. Aller chercher des gains ne passe pas que par la négociation, du moins ce n’est pas toujours le bon point de départ. Privilégions l’acheter moins, puis achetons mieux en questionnant le coût complet des achats, et alors peut commencer une négociation plus réfléchie. Les gains les plus intéressants se trouvent souvent dans cet “acheter mieux”. En bref : la négociation est la fin d’un processus et non pas le point d’entrée. Bien entendu, cela ne suffit pas, il faut également outiller les équipes, maîtriser les risques, évaluer les fournisseurs, etc.
De ces axes se dégage un chemin intéressant, celui d’une aventure collective et de la réconciliation entre économie et écologie. Urgente et nécessaire. La balle est dans leur (notre) camp.
Et si vos achats devenaient le moteur de votre performance durable ?
Chez R3, nous vous guidons pour acheter moins, mais mieux. Grâce à notre approche TCO2, identifiez des leviers concrets pour réduire vos coûts, vos impacts et transformer vos pratiques.